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Ils se sont donnés pour mission de corriger des sauvages


« Ça !? Il a bien dit “ça” ? C’est-il pas évident que c’est un gosse ? Il a même pas de poux dans les cheveux ; quelque part, un parent doit forcément le chercher ! » (Extrait de L’enfant sauvage de Celine Delbecq.) Ce monsieur qui ramène la petite qu’il a trouvée sur son chemin, après avoir pris le soin bien de vérifier qu’il ne s’agissait pas d’une bête, s’indigne du peu de cas qu’en font les policiers. Alice qu’il l’appelle.

Dans “L’enfant sauvage”, le comportement des policiers à l’endroit de la petite Alice n’a rien de particulier ; c’est celui d’un nombre incalculable de responsables d’enfants à travers le monde entier. Dans ce texte de Céline Delbecq, la réaction de cet homme qui se proposait de l’adopter n’est pas non plus nouveau ; c’est au nom de cette même indignation que des dizaines de personnes ont répondu à l’invitation de ce Mardi 21 Novembre.


Les psychologues Edwige Milien et Natasha Périclès, la sociologue Danièle Magloire et l’historien Pierre Buteau se sont retrouvés sur un même panel autour de la question “Pourquoi battre les enfants est-il quotidien en Haïti ?”. Laurence Durand commence par la lecture de l’œuvre de Céline et son aisance dans le maniement des mots autant que dans le gestuel met l’assistance dans l’ambiance du sujet et la prépare à accueillir toutes les informations qui devaient suivre.


La maltraitance infantile étant préalablement définie comme toute atteinte à la personne de l’enfant, âgé entre 0 et 204 mois, dans toutes ses dimensions ; ils effectuent un survol des probables conséquences de cette dernière. Compromission du développement du sujet sur les plans psychologique, social et autres ; mise en place d’un système de protection par la victime qui à son tour fait augmenter la violence du bourreau ; dégradation des rapports parents-enfants ; grande permissivité, observée a l’âge adulte, chez le sujet qui a subi de mauvais traitements dans son enfance. Mais que comprendre du pourquoi de ces comportements ?


Dans notre société, le fait de battre son enfant constitue un moyen d’éducation. Cet être relativement faible, considéré par ses parents comme une faute en soi ou encore une pâte, il s’agit pour ces derniers de le corriger, le modeler au fur et à mesure. Toutes leurs fautes assimilables à des erreurs, les parents ne peuvent rien laisser passer. Paradoxalement, ils le préparent pour une société où l’impunité fait loi. Mais bien à côté de ce désir de bien faire, maltraiter son enfant représente une excellente occasion de se libérer de toutes les pressions et frustrations quotidiennes.


“Il est important pour la victime de ne surtout pas se considérer comme telle”’ souligne Madame Milien. Il n’a pas le droit de protester, il n’a même pas le droit de laisser libre cours aux émotions que suscitent en lui ce genre de situation au risque d’être accusé de faire preuve d’irrespect. “Timoun se ti bèt”, clament-ils souvent comme pour se donner une raison ; les animaux ne sont que peu tolérés dans notre pays, la maxime dit donc ce qu’elle dit. La violence faite aux enfants apparaît dans toutes les couches de la société, se présente sous diverses formes, et, bien entendu, ne date pas d’hier.


Le professeur Buteau, à l’aide d’une brève notion d’histoire attire l’attention sur toute la similitude que peut avoir ce fait avec l’esclavagisme qu’a connu Haïti. Car, de même que chez les commandeurs d’autrefois, il n’y a pas que le fait de frapper ; ce qui prévaut c’est cette volonté de faire mal, cette intention destructrice qui donne son sens au geste. Est-ce vraiment que les tuteurs font très peu de cas de leurs pupilles ou du moins, est-ce le résultat d’un manque­ ou d’une absence d’informations et de sensibilisation sur la notion de parentalité ? Les intervenants laissent la question dans l’air, et les participants se préparent déjà à une autre intervention tout aussi intéressante.

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